Rencontre littéraire [Privé Akemi Hanasaki] //Terminé//

" Ecoutant, en effet, les cris d'allégresse qui montaient de la ville, Rieux se souvenait que cette allégresse était toujours menacée. Car il savait ce que cette foule en joie ignorait, et ce qu'on peut lire dans les livres, que le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais, qu'il peut rester pendant des dizaines d'années endormi dans les meubles et le linge, qu'il attend patiemment dans les chambres, les caves, les malles, les mouchoirs et les paperasses, et que, peut-être, le jour viendrait ou, pour le malheur et l'enseignement des hommes, la peste réveillerait ses rats et les enverrai mourir dans une cité heureuse. FIN"

Edouard referma le livre et regarda autour de lui. La bibliothèque avait reprit son silence habituel. Il était tellement absorbé par Albert Camus qu'il n'avait vu la salle se vider peu a peu. Quelle heure pouvait-il bien être? Comment avait il pu se plonger autant dans le roman pour ne pas voir que tout le monde était parti? La bibliothécaire n'aurait pas pu le prévenir?... Autant de question qui restèrent dans le flou, sûrement dû au fait que le jeune homme, dont les pensées étaient encore encrées au livre, se fichait complètement des réponses. En regardant par la fenêtre il vit que le soleil qui brillait lorsqu'il était arrivé avait fait place a une pleine lune qui donnait a la nuit une étrange clarté. L'élève fut même étonné de distinguer entièrement un chaton noir qui dormait dans l'herbe.
- C. C. C.... Ah! Camus voila!
Il rangea le livre sur l'étagère et retourna chercher son sac qu'il avait laissé sur la table. En soulevant son sac il fit tomber un livre.
*Tiens je ne me rappelle pas avoir emprunté un second livre... quelqu'un a du le laisser sur la table lorsque je lisais sans que je ne m'en rende compte*
Edouard ramassa le livre et observa la couverture: Danse macabre de Stephen King. Il connaissait ce recueil de nouvelles. Au collège il cauchemardait sur ses récits fantastiques, mais maintenant la seule marque d'émotion qui se lisait sur le visage du jeune homme fut un sourire nostalgique. Il retourna au milieu des étagères pour ranger le livre. Alors qu'il cherchait désespérément "King" dans la bibliothèque, il cru entendre un bruit dans le couloir. Il pensa d'abord que son esprit, resté auprès d'Albert Camus, lui jouait des tours, mais après un long moment de silence, il en conclut que non. Il y avait bien quelqu'un dans le couloir.
*C'est surement la bibliothécaire ... ou pire... un surveillant. Si jamais ils te voient ici à cette heure ci et que tu es renvoyé tu auras fait un passage éclair dans cette académie Eddy*
En Effet, il était étudiant dans cette académie depuis peu.
Edouard décida d'éteindre la lumière et d'aller se cacher entre deux étagères. Dans le couloir les pas se rapprochaient. Il réfléchissait trop pour avoir peur. Il entendit la porte s'ouvrir. A ce moment la, il eut une montée d'adrénaline. Ses doigts se crispèrent sur le livre qu'il avait entre les mains, non pas parce qu'il avait peur, mais parce qu'il savait qu'il allait se passer quelque chose de sérieux, de décisif. La lumière s'alluma. Mais il ne vît personne. Le surveillant devait être à l'autre bout de la salle. C'était une occasion en or pour filer en douce. Edouard cheminait dans les rangées en direction de la porte, en se faisant le plus discret possible. Il arriva non loin de la table ou il avait fini le dernier chapitre de "La Peste" peu de temps avant. Quelqu'un se tenait devant celle-ci, faisant dos au garçon. Edouard s'arrêta net.
*ça y est c'est fini pour toi tu vas te faire renvoyer... j'entends déjà ta mère: " Une honte! Tu es une honte... Je savais que tu allais me décevoir encore, mais pas à ce point! Vraiment des fois j'aurais mieux fait de ne pas t'avoir, j'aurais pu m'éviter toutes ces déceptions*
Et alors que les piques sanglantes de sa mère résonnaient à ses oreilles, le regard d'Edouard fixait les cheveux roux de la personne devant lui.
*Hé mais attends! c'est pas le surveillant!*
En effet, la personne qui se tenait devant lui paraissait jeune, surement un étudiant, et semblait chercher quelque chose. Edouard ce demanda ce que pouvait bien faire un élève à une heure pareille dans la bibliothèque. Cette personne éveillait sa curiosité, et en tant que scientifique il se devait de se pencher sur la question. Tenant toujours "Danse macabre" à la main, il tendit son bras en direction de l'autre garçon:
"Est-ce que c'est ça que tu cherches?"

Son livre, Il avait été là. Dans le fond du sac. Bruits de papier froissés, de livres jetés sur la commode avec force, à travers la pièce. Il devait être là. Sans lui, il ne pourrait pas relaxer. Allez, montre-toi. C'est à peine s'il ne l'appelait pas 'livre, livre, viens ici.'' Comme un petit animal. Plus il fouillait, plus la sueur lui coulait dans le cou et ses mains devenaient moites. Où, il l'avait mis ?! Après son éternel devoir de mathématiques, la lecture lui permettait de s’endormir. Il fallait qu’il le retrouve ! Bon, ses mains se mirent à trembler. ‘Douille. Les autres pochettes, dézippés, retourné dans tous les recoins. Encore et encore. Rien que du vide palpable sous ses doigts. Il jeta le sac près de la porte. Par moment de rage, puis se passa une main dans sa chevelure. Il adressa un regard sombre à son manuel de mathématiques. C’était de sa faute, à ce livre de maths. Non… Il ne… Trop Tard. Le voilà déjà dans les airs. Akemi suivit la course du manuel qui atterrit dans un bruit mat. Le doute s’empara de son esprit. S’il l’avait oublié dans un local ! Non… Impossible, il se souviendrait. Il se rappelait toujours quand il abandonnait ses effets en classe. Le roux se mit à soupirer. Quels avait été les derniers lieux qu’il avait visités ? La cafétéria avec sa bouffe… Il avait mangé une viennoise en vitesse puis avait été à la bibliothèque pour s’endormir sur son devoir de philosophie. Il se redressa vivement sur son séant. Il devait être là ! Sinon… sinon. Bah. Il s’emmerderait à s’acheter un autre bouquin de King. Akemi revêtit rapidement son t-shirt et même si les gens se promènent en baskets. Il irait pieds nus pour ce soir.

Le parquet craquait sous ses pas feutrés. Il longea lentement le comptoir de la réception. Il avait été certain d’avoir vu une lueur sous les portes quelques instants auparavant. Pourtant, il ne vit aucun libraire dans les environs. Ses yeux avaient dû le tromper. Les rayons lunaires rendaient un aspect glauque. Akemi eut un sourire amusé, mais il ne verrait rien dans le noir. Il alla appuyer sur un interrupteur tout près du local de repos des bibliothécaires et en grésillant la plupart des néons qui illuminaient le jour la vaste pièce s’allumèrent. Il attendit quelques instants pour que ses iris s’habituent au changement de lumière. Akemi ne connaissait pas tous les recoins, mais ses repères étaient déjà établis, parce qu’il trainait souvent dans des lieux semblables lors de ses pauses. Avec précaution, l’étudiant s’approchait des rayonnages. Une liste lui apparaissait par catégorie. Il repéra la section au fantastique et s’y dirigea rapidement. Arrivé au bout de la rangée, sa mémoire, lui revenait graduellement. Il était certain d’avoir déposé le recueil sur la table et que parce que quelqu’un l’avait insulté, il l’avait engueulé, au final on l’avait sorti de la bibliothèque pour grabuge. Il constata avec dépit que son roman n’y était plus. Aki poussa un long soupir d’exaspération. Fallait qu’il sorte ses billets verts à nouveau. Alors qu’il allait rebrousser chemin, quelqu’un lui demanda s’il ne cherchait pas un livre. Surpris, il eut un léger sursaut puis se retourna pour faire face à un adolescent. Son regard vert, erra du visage enfantin au livre qu’il tenait dans ses mains. La couverture était bien celle de son roman. Il eut un sourire en coin. Il tendit ses mains, le prit finalement, caressant la page couverture, glissant ses doigts sur le titre en relief, le regard visiblement ému par la retrouvaille. Puis laissant ses iris plonger dans le bleu royal de l’autre étudiant.

« O-oui. Je le cherchais partout… Je croyais qu’on avait fini par me le voler. Merci… Je te redevrais cela… Je m’appelle Akemi»

Il pouvait bien bégayer. La joie qu'il ressentait était aussi euphorisante que ses doses quotidiennes. Il n'allait tout de même pas brailler, mais la peur maintenant était passé. Il avait pu retrouver son manuel. Le livre de son père. Il lui tendit sa main valide. C’était à l’autre garçon de voir si ça lui plaisait ou non. Surtout qu’ils étaient après le couvre-feu établi.

"Est ce que c'est ça que tu cherches?"

À ses mots, l'homme devant Edouard sursauta légèrement et se retourna si brusquement qu'on aurait dit un prédateur venant de sentir la présence de sa proie juste derrière lui. Le rouquin semblait nerveux, trés nerveux. Il présentait une sorte d'hyperactivité que l'on peut déceler chez certains toxicomanes en manque. Edouard sut qu'il avait eu raison de penser que le livre qu'il tenait dans la main appartenait au jeune homme en face de lui au moment même oû celui-ci fixa la couverture tout en esquissant un sourire en coin. C'est donc avec un certain soulagement d'avoir fait mouche lors de ses déductions qu'il rendit le roman à son propriétaire. Une fois le livre en main, le garçon parut euphorique, comme transporté ailleurs. Edouard profita du bref instant d'inattention de son interlocuteur pour le dévisager sans se faire repérer et ainsi ne pas paraître impoli. Il n'était pas très grand, aucun signe remarquable si ce n'était son regard. En effet, ses yeux verts étaient flamboyants, du moins ils le furent à une certaine époque. En effet , ils portaient des traces d'usures. Edouard devina que la personne qui se tenait en face de lui avait (ou avait eu) des problèmes de drogues, mais ça l'effrayait ni le repoussait en aucun point. Chaque personne a ses propres problèmes, Edouard était bien placé pour savoir cela car, dans des moments d'égarement oû la réalité lui sautait à la figure, lui même avait songé à s'évader dans cet autre monde que pouvait lui offrir ces "substituts de la réalité".

"-O-oui. Je le cherchais partout... Je croyais qu'on avait fini par me le voler. Merci... Je te revaudrai cela... Je m'appelle Akemi"

Le rouquin lui tendit une main hésitante qu'Edouard s'empressa de serrer. Le premier élève de l'établissement qui lui parlait, c'était une occasion en or de faire connaissance, même si l'heure avancée et la ronde des surveillants dans les couloirs faisait planer une épée de Damoclès au dessus de leur rencontre.

"Enchanté je m'appelle Edouard... Edouard Verlaine... Je suis nouveau ici. Je vois que tu aimes Stephen King, j'aime beaucoup aussi"

Et sans lâcher du regard les yeux verts d'Akemi, il fit un de ses sourires dont il a l'habitude. Un de ces sourires qui emmène à la sympathie. Un de ces sourires qui est rempli de bons sentiments.
Un de ces sourires qu'on ne peut ignorer.

Il ne savait pas pourquoi, mais il avait l'impression d'être un con à tendre sa main dans le vide. À attendre peut-être quelque chose qui ne viendrait jamais. À espérer ne pas s’être donné la peine de s’introduire pour avoir que de l’air en pleine figure. Il se mit à regarder par-dessus l’épaule de l’autre étudiant, par réflexe d’avoir trop observé de trous dans un mur. Allons, Akemi, ce n’est pas un bon geste à faire. Il reconcentra son regard sur le minois de l’étudiant et remarqua finalement les iris. Akemi n’aimait pas se scotcher à un mec simplement dans le but de parler pour rien. Il ne pouvait qu’attendre mais sa patience avait des limites. C’est vrai ces iris étaient fascinants, le roux n’en avait jamais vu d’aussi ombrageux et à la fois opaque. Tellement pale qu'il jura qu’il y plongerait volontiers. Un peu comme une chaude soirée d'été, pour se rafraichir, faire un grand plongeon dans une eau glacée. D’ailleurs, même si le joli drogué voulait les détourner, Kemi ne pourrait rien n’y faire quant à cette découverte. Il était trop mystérieux et comment dire... Non, il ne trouvait pas l’adjectif. Ça reviendrait une autre fois. Et puis, ce n’était pas le moment de planer sur ses nuages, il le vit se pencher vers lui, lui prend la pince. Il eut un sourire agréable, au moins, son attente avait été récompensée. Puis, le jeune étudiant se présenta à son tour. Ainsi il était nouveau comme lui ? C’était bien, il avait pensé être le seul qui était transféré à Seiko en cette période de l’année. Aussi les présentations faites, Akemi se sentit plus serein. Il avait l’air moins taré avec sa main qui avait serré celle d’Edouard.

« Étrangement… je suis moi aussi un nouveau étudiant. J’adore la chambre 1408 aussi, et la plupart de ses romans. Oh… et je crois qu’on devrait aller dans les rangés des poufs, plus loin près des fenêtres et fermer les lumières. Comme cela on sera pas dérangés… À moins, que tu avais des plans pour ce soir ? »

Il lui offrit un petit sourire, sourire qui lui spinnait un peu les joues car il n'avait plus l'habitude de sourire depuis longtemps. D'ailleurs, il se demandait s'il ne sautait pas les étapes normales d'une relation... dite simple.

« Étrangement… je suis moi aussi un nouveau étudiant. J’adore la chambre 1408 aussi, et la plupart de ses romans. Oh… et je crois qu’on devrait aller dans les rangés des poufs, plus loin près des fenêtres et fermer les lumières. Comme cela on sera pas dérangés… À moins, que tu avais des plans pour ce soir ? »

Cette idée ravissait Edouard. Au moins, ce soir, il ferait autre chose que réviser ces leçons, une autre activité que le zapping télé. Et cette nuit au moins, la solitude ne le gagnerait pas, il allait pouvoir penser à autre chose, s'aérer l'esprit.

" A vrai dire je devais aller voir un ami ce soir. Mais ce n'est pas trop grave, j'irai le voir un autre jour "

Bien sur, cette affirmation était fausse. Depuis qu'il était arrivé ici, il ne s'était fait aucun ami. Il parlait de temps en temps à ses anciennes connaissances, mais elles vivaient à l'autre bout de la Terre et le mieux que le jeune homme pouvait faire, c'était prendre de brèves nouvelles. Mais malgré cela, Edouard ne voulait pas perdre la face devant le rouquin. Il voulait paraitre "cool", même si le mensonge qu'il venait de prononcer l'emplit d'un terrible malaise... et d'une certaine honte. Il n'aimait pas mentir. Les seules fois ou il le faisait, il mentait à sa mère, tantôt pour cacher une note considérée comme honteuse, tantôt pour dissimuler une partie de jambe en l'air avec un garçon qui lui vaudrait la réputation de "honte de la famille". Mais jamais il n'avait menti à des personnes qu'il connaissait à peine. Pourquoi avait-il dit cela? Son visage devait refléter son malaise et Akemi ne mettrait pas longtemps à découvrir la supercherie, si ce n'était pas déjà fait. Pour couper court, Edouard lança:

" Vas y je te suis... on va se caler là-bas on sera tranquilles "

Et ainsi les deux connaissances ( toutes fraiches ) s'engouffrèrent dans un rayon puis s'avachirent sur les poufs de la bibliothèques. Ils étaient confortables. Edouard se senti soudain soutenu, porté, capitonné par ce gros sac de plumes recouvert de tissus, comme si la forme et la place de son corps avaient été marquées d'avance sur le pouf. Il aurait pu partir dans les bras de Morphée si facilement qu'il n'osait pas fermer les yeux ne serait-ce qu'une seconde. Sans bouger de sa position douillette, il porta sa main au mur pour appuyer sur l'interrupteur de la lumière. Les néons s'éteignirent en même temps, laissant pour seule source de clarté la magnifique lune de cette nuit dégagée. Edouard aimait regarder le ciel nocturne. Il se perdait souvent parmi les étoiles. Ce soir, la lune était d'un gris argenté des plus brillants. Cet astre qui avait guidé tant de navigateurs, passionné tant de scientifiques, était comme une source de joie pour le jeune homme. Lorsqu'il regardait la lune et les étoiles, tous ses soucis se perdaient dans l'immensité de ce qu'il voyait. Il se purgeait dans tous ces éclats. Il se baignait dans la lumière salvatrice de cet astre fascinant. A ce moment là, il aurait pu lui parler, il aurait pu la toucher, mais il n'en a rien fait. Il l'a seulement regardé. Il voulait s'en approcher mais resta là sans bouger. Un bruit derrière lui rappela au doux rêveur qu'il n'était pas seul. Edouard tourna la tête et fixa pendant un moment Akemi. Il n'aimais pas parler en premier après des moments de blanc. Il se contentait juste de le regarder avec un regard soutenu comme pour dire de ses jolis yeux bleus:

"Alors? Vas-y! Qu'est-ce que tu attends? Lance toi"

Son interlocuteur avait le regard perdu. Non, il était admiratif. Akemi s’arrêta brusquement en chemin vers le prochain pouf. Il déposa cependant son livre sur la table base. Qu’est-ce qui attirait autant de brillance dans les iris ? Il observa et vu des éclats briller. Des éclats argentés dans les prunelles du garçon. Serait-ce des étoiles ? Il suivit le regard d’Edouard, le ciel étoilé se dévoilait sous son regard usé. Il ne savait pas trop ce qu’il ressentait à les observer ainsi. Simplement, qu’il était ébloui de pouvoir les voir aussi brillantes, les observer à œil nu. Sans fixatif, sans drogues. Il soupira. Il foutrait sa vie pour ne pas voir la réalité… Tant pis. Sa carence reviendrait le hanter tôt ou tard, cette nuit ou demain au petit matin. Encore tant pis. Ce soir, il se foutrait bien de sa dose. De sa douleur du monde. Il avait une compagnie. En baissant ses paupières, son regard croisa celui du beau brun. Que quoi... Fallait encore qu'il se jette à l'eau. Misère de misère. Il lui souriait confiant, alors qu’il rageait en son for intérieur. Le rouquin se laissa tomber sur le pouf qui se pliait à son poids en s'enfonçant plus profondément sur la structure d’osier.

« Bon vu que t’es assis. C’est bien parce que j’ai beaucoup à raconter…»

Il réfléchissait à toute vitesse. Hors de question d’aborder ses problèmes de consommation. Il s’avait déjà son nom, il savait qu’il aimait Stephen King. Et son programme d’études ? Nah… Pas besoin de lui dire qu’il était… formation régulière.

« J’ai 19 ans, j’ai des origines japonaises… je suis roux naturel, alors me demande pas pourquoi, je n’ai pas l’air asiatique…. Je suis né aux état-unis, à New York. J'ai immigré ici il y a peu pour étudier et renouer avec mes origines. Hmm, je suis nouveau comme toi, je suis en formation régulière. »

Il sentit ses joues devenir de feu. Quoi, il rougissait pour quoi ?! Hey. Il ne l’aimait pas. Il devait avoir honte, ou c’était un coup de chaleur. Un effet involontaire. Ça sortait d’un coup, comme une passoire. Sans qu’il y pense, sans rattraper les fautes. Sans avoir aucune considération pour le mec à ses côtés. On le prendrait pour une pie. C'était peut-être mieux ainsi. On le croirait sympathique, franc... Un peu naif sur les bords. Ça plaisait à Akemi. Pour autant que le filet n'allait pas se refermer sur lui. Il resta quelques minutes à regarder la table et son livre. L'idée de lire effleura son esprit puis il la chassa aussitôt. Il était content et pourtant aussi nerveux que s'il était en date avec quelqu'un.

« humm… Et toi, tu es dans quel programme, edouard ? »

Il osa le regarder, en espérant que le noir cachait le fard qui lui barbouillait les joues.

« Bon vu que t’es assis. C’est bien parce que j’ai beaucoup à raconter…»

Edouard se senti soulagé d'entendre ces paroles. Il allait enfin en savoir un peu plus sur la personne qu'il avait en face de lui: il semblait gentil, mais son visage avait un coté mystérieux. Il savait qu'Akemi avait des secrets et des problèmes, ou du moins il en avait les marques, et sa curiosité naturelle montait en lui en l'emplissant d'une excitation que l'on pourrait qualifier de malsaine. Il était comme un journaliste qui détenait un scoop et n'attendais plus qu'une preuve verbale pour finaliser le tout, comme un gamin qui va avoir une récompense pour ses bonnes notes mais qui ne sait pas comment elle va se manifester.

« J’ai 19 ans, j’ai des origines japonaises… je suis roux naturel, alors me demande pas pourquoi, je n’ai pas l’air asiatique…. Je suis né aux état-unis, à New York. J'ai immigré ici il y a peu pour étudier et renouer avec mes origines. Hmm, je suis nouveau comme toi, je suis en formation régulière. »

La masse d'information que le rouquin venait de déblatérer si vite, sans prendre le temps de respirer, mis un certain temps avant d'être entièrement acheminée au cerveau d'Edouard. Une fois le tout analysé, Edouard fut déçu de ne pas tenir mieux que ces faibles informations. Il s'attendait à une révélation. Il était bête de penser cela. Personne n'avoue ses problèmes de drogues ou autre dès le premier échange verbal. Lui même n'aimait pas se dévoiler, alors pourquoi les autres le feraient? Malgré la pénombre omniprésente dans la pièce, il vit qu'Akemi rougissait. Avait-il menti? Avait-il caché quelque chose? Cela titilla de plus belle sa curiosité. Il ne voulait pas en dire plus que son interlocuteur. C'est pour cela qu'il sorti tout naturellement:

"Beh moi c'est Edouard je te l'ai déjà dit. Mais tu peux m'appeler Eddy. En effet tu n'as pas le physique asiatique, mais cela te va bien... Je suis Français, tu te demandes pourquoi je suis venu ici a l'autre bout du monde? Et bien même moi je ne le sais pas. Je suis né à Paris. Et je viens d'arriver ici dans le cursus biologie"

C'était parfait. Il n'en avait dit ni trop, ni pas assez. C'était à Akemi de répondre. Petit à petit, Edouard allait atteindre son but. Et alors qu'il s'apprêtait à lancer un commun "Et sinon? Tu racontes quoi de beau?" reflétant son impatience, les néons de la bibliothèque se rallumèrent.

"Il y a quelqu'un ici? J'ai entendu du bruit! Montrez-vous"

Il se cala encore plus dans le pouf, laissant sa tête dans un rembourrage. Ah que ça faisait du bien de sentir le tissu frotter contre son épiderme. Ça faisait trop longtemps... Trop même. Qu'il n'avait pas été aussi sobre. Aussi énervé et confus. Ses mains tremblaient de son manque. Il les crispait contre le lainage. Comme quand la première fois qu'il avait été possédé par un autre mec, après avoir pris de l’ecstasy dans un party. Dans une chambre d'hôtel. Il avait encore une fois trop bu et on avait abusé de lui. Enfin, aguichant, non, il était consentant. Black out… total. De toute manière, c’était trop confus, juste des couleurs et des paroles. Un lit qui couinait trop, murmures trop flous, baby you’re… Non, non, pas un putain. Une star ? Oui, une star… surement pas de cinéma, mais d’affiches grandes et dénudées. Boite de nuit, alcools. Ce genre de trucs. Oh et des billets verts, oui. La seule chose qui avait resté qui restait la plupart du temps sur le lit après son réveil et son affreuse gueule de bois. Amour, boissons, drogues et soirée payable, la vache. Mais ça n'intéresserait personne tout cela. Surtout pas un étudiant. Sans reproches, qui semblait sans tâches comme Edouard. Amour, boissons, drogues et soirée payable, la vache. Ça ne remontait à pas loin, ces trips. Surement que le brun ne connaissait rien de tout cela. Et pourtant... depuis son arrivée, Akemi semblait dire ses fantômes à tout le monde. Et c'était pour cela qu'il avait rougit. L’autre étudiant, n’avait pas à savoir tous ces problèmes. Il tendit une oreille semi-attentive à son interlocuteur, les flash-back étaient trop puissants. Cependant, il les refoula quelques minutes. Il apprit entretemps entre ses songes nocturnes et sa conscience éveillée que son homologue était français, qu’il le trouvait mignon… Du moins c’est ce qu’Akemi pensait et ses pensées... étaient ce qu'il voulait qu'elles soient. Il eut l'impression que ses rougeurs venaient de s'accentuer d'une coche. On pouvait lui dire pourquoi d'ailleurs ?! Ce n’est pas comme s'il le connaissait. Ça faisait presque que le même sentiment ambigu qu'il avait eu avec Ciel. Un coup de foudre ? Non, il n’y croyait même pas. C’était trop cliché en plus. Il se tourna vers son interlocuteur. Ce dernier avait la bouche prête à lui murmurer quelque chose, mais s'arrêta dans son élan. Une lumière l'aveugla et une voix grave tonna. Et mer**, on venait gâcher leur moment de rencontre. Maudit donuts !! Si ça tenait de lui, il aurait étampé sa main au visage du patrouilleur. Il se mordit les lèvres pour ne pas crier une obscénité, un truc qui les dévoilerait. Il ne pouvait pas... Il se devait... Il se devait quoi ? Épargner Edouard ? Cette connaissance... Il haussa un sourcil prit dans le dilemme. Ses lèvres lui firent mal. Au sang, il avait un début de fer en bouche. F****, il prendrait le risque. Le rouquin le regarda avec un air déterminé :

‘’ Enfuis-toi pendant que je l’attire… Ne te retourne pas’’

Advienne que pourra. Il se leva de son siège, jeta un dernier regard à l’étudiant en biologie, prit au passage son livre. Longeait les rayons, indifférent, il allait jouer doux. Très doux avec le donuts. Jouer l’innocent. Crier ? Une rage le prenait, sortait de ses entrailles remontait graduellement plus ses pas l’amenaient vers le gardien. Il avait coupé un moment qui s’annonçait beaucoup plus le fun que sa radio à fond sur son métal rock, ses seringues. Il s’ouvrait un peu avec le monde. Renouer. Coups de talons trop brusques sur le parquet, une ombre. L’ombre oppressante du bouledogue. Comme un soldat sur le champ de bataille, il était seul contre l’envahisseur. Il se força à prendre une grande inspiration. L’homme ne lui inspirait pas confiance. Trop sévère, dans le regard. Ce qu’il foutait là ? Pas de ses affaires. Non… Il avait égaré son livre. Il ne le croyait pas. Pardon ?! Et lui qui disait qu’il était vraiment garde de sécurité tant qu’à y être ?! Le poil s'hérissait sur les avant-bras du rouquin. Qu'il se ferme le clapet, le donuts. Il se retenait de ne pas lui sauter à la gorge. Qu'il le laisse passer. Oui passer. T'es sourd le gros ? Retourner dans sa piaule. Il connait le chemin. Il regardait par-dessus l’épaule pour voir une silhouette passer par la porte. Ouff… Edouard serait en sécurité, le poids qui reposait sur ses épaules, s'allégea soudainement. Il promit au garde de ne plus laisser trainer ses objets et parti rejoindre sa piaule. Le rouquin rangeait un peu ses affaires avant de s'effondrer dans son lit. Les émotions avaient été violents. Ça l'avait épuisé... Il espérait que sa connaissance avait pu rentrer sans encombrements. Des hypothèses surgirent de son esprit et puis à force d'y penser, ils finirent par le bercer aux pays des songes.

~ Fin